Les Amants passagers ( Los amantes pasajeros)
Pedro Almodovar
Sortie cinéma :
27 mars
Pedro Almodovar,
dont la renommée n’est plus à faire, a décidé de se faire plaisir, et la
question que l’on se pose est : est-ce que c’est pour le nôtre ? En effet, le
réalisateur est plus habitué aux histoires de famille qui tournent mal ou dont
le passé peu glorieux ressurgit. De l’enfant qui meurt, à l’enfant né d’une
relation incestueuse, en passant par la prostitution, la drogue, la sexualité
débauchée, ses films sont de ceux qui ne passent généralement pas inaperçus
dans notre mémoire.
Quand je dis que
Pedro Almodovar s’est fait plaisir, c’est parce qu’il a réalisé ici une comédie
chorale qui, comme ce mot l’indique, n’a pas d’acteurs principaux et dans
lequel il y a rassemblé de nombreux acteurs espagnols que vous aurez peut- être
déjà eu l’occasion de croiser dans un de ses précédents films (c’est par
exemple le cas pour Javier Camara, Penelope Cruz, Lola Duenas, Cecilia Roth)
ou dans d’autres films de la même nationalité (La Ballada Trista, Un
jour de Chance, Extraterrestre, Yo tambien). De plus, Pedro
Almodovar a décidé de ne présenter ce film dans aucun festival, le réservant
donc à son public.
L’histoire est
simple. À la suite d’une erreur technique commise par des agents de piste d’un
aéroport, un des trains d’atterrissage est bloqué, et les passagers du vol 2549
à destination de Mexico, se voient tourner en rond au-dessus de Tolède en
attendant que les équipes au sol trouvent et préparent une piste pour un
atterrissage d’urgence.
Constatant qu’il
n’y a ni film ni musique, et que l’haleine des stewards sent quelque peu
l’alcool, les passagers de la classe «Affaires» commencent à se poser des
questions et très vite, ils commencent tous à envisager leur mort
imminente. L’alcool aidant, les passagers de la classe «Affaires», les
pilotes et les stewards vont en venir chacun leur tour à révéler ou trahir le
secret qui les rongeait jusque-là, et vont tenter de réparer leurs erreurs du
haut de leur cinq mille mètres d’altitude. Un don juan qui tente de join- dre
sa dernière compagne, une célébrité convaincue que c’est un attentat contre elle,
des pilotes et stewards qui ne sont pas uniquement collègues de travail, une
vierge aux prémonitions morbides, les personnages sont clairement ceux qu’a
l’habitude de mettre en scène Pedro Almodovar avec ceci de plus qu’ils n’ont
pas à être autant plausibles que dans ses films précédents. Ou, comme le dit le
réalisateur himself : « le film n’est pas une comédie réaliste, ni
surréaliste, ni néoréaliste, c’est une comédie irréaliste et métaphorique ».
Des précédents «
Almodovar », Les Amants passagers a la thématique en commun : l’amour et
la mort. Mais la mort ne prend pas par surprise dans ce film-ci, elle n’est pas
non plus la raison d’un deuil à faire, elle est envisagée depuis le début, et
seul votre déplacement dans les salles obscures vous dira si elle a belle et
bien lieu.
Les scènes hautes
en couleurs et les situations burlesques, comme celle des stewards exécutant
une chorégraphie sur I’m so exited des Pointer Sisters afin de détendre
l’atmosphère, sont soutenues par des acteurs ayant le rythme de la comédie dans
la peau. Ma préférence va pour Guillermo Toledo qui interprète le bourreau
des cœurs Ricardo Galan que j’ai, à ma grande et agréable surprise, retrouvé
ici et que j’avais déjà eu l’occa- sion d’adorer plusieurs fois dans Le
Crime Farpait de Alex De La Iglesia dans lequel il interprète un rôle
similaire.
En résumé, le
film est drôle, au rythme plutôt soutenu, aux musiques entrai- nantes, aux
mœurs légères, abordant la bisexualité, l’homosexualité et le sexe sous
d’autres facettes, comme Pedro Almodovar en a l’habitude.
Publié dans Le Suricate magazine n°14
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